Le poète ? Il n’est pas un révélateur de paradoxes comme peut l’être le philosophe. Il est le paradoxe. Il s’engouffre dans cette plaie et se laisse couler jusqu’au revers de la toile langagière qui recouvre le monde. De cette position, il a tout le loisir de se jouer des mots, de les subvertir comme cela lui chante, de les détourner de leur fonction originelle, de les extirper du règne auquel ils sont dédiés: celui de l’utilité. La poésie est toujours une affaire de rébellion. Lire la suite « Bagatelle #3: Le poète »
Étiquette : Sens
Résolution nocturne #3
Il est malheureux de ne plus savoir par où aller. Mais il est encore plus malheureux d’aller dans la mauvaise direction sans le savoir. Et il est carrément atroce d’aller dans la mauvaise direction en pleine connaissance de cause. Tu es perdu ? Cela pourrait être pire, bien pire. Déjà, tu t’es un peu trouvé.
Attentat contre un pronom interrogatif
Je me souviens encore de la première fois que ça m’est arrivé. J’avais douze ou treize ans et, par une douce soirée de fin de septembre, assis dans l’entrée de la maison familiale avec une amie, j’observais attentivement le ciel. C’était une soirée particulièrement claire et magnifiquement étoilée ; je suppose que l’on pourrait dire que c’était le genre de soirée qui dispose l’esprit aux rêveries. Je ne sais pas ce qui m’a pris ce soir-là mais tout à coup, la noire opacité de la nuit ne m’a plus satisfaite, et mon regard ne voulait plus s’y arrêter. Les astres, gracieusement arrangés et la traînée phosphorescente de la voie lactée pouvaient bien faire les belles : elles ne me distrayaient plus du spectacle troublant de la noirceur infinie dans laquelle elles se noyaient toutes deux. Lire la suite « Attentat contre un pronom interrogatif »
Citation de la semaine: Edmund Husserl
Tout non-sens n’est qu’un mode du sens.
– Méditations cartésiennes
Vrombissantes vérités
On ne dira jamais assez à quel point nos sentiments sont précieux. D’ailleurs, les philosophes de l’histoire ne l’ont pas suffisamment dit. Nos sentiments ne mentent jamais, car ils sont par essence porteurs de notre vérité la plus intime; ils disent ce que nous sommes, ce que nous vivons, ce à quoi nous aspirons. Ils ne mentent jamais et cela, en raison du fait qu’ils précèdent tout travail de notre conscience – autrement dit, parce qu’ils découlent de la plus stricte nécessité de notre corps. Les sentiments s’imposent à notre pensée comme la force gravitationnelle s’impose aux objets de la terre: c’est-à-dire d’une manière parfaitement implacable. Lire la suite « Vrombissantes vérités »