Lecture de la Bible: Genèse I, 24-25

Lecture de la Bible: Genèse I, 24-25

Élohim dit: « Que la terre fasse sortir des animaux vivants selon leur espèce: bestiaux, reptiles bêtes sauvages, selon leur espèce ! » Il en fut ainsi. Élohim fit donc les bêtes sauvages selon leur espèce, les bestiaux selon leur espèce et tous les reptiles du sol selon leur espèce. Élohim vit que c’était bien.

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Évidemment, il ne peut que frapper nos consciences d’hommes du XXIe siècle que le brave Élohim ait conçu de créer les animaux « selon leur espèce », comme cela est d’ailleurs précisé à maintes reprises tout au long de ces deux versets. En effet, cela nous est aujourd’hui une vérité banale que d’affirmer que les espèces d’animaux sont le fruit d’une évolution qui s’étend sur des millions d’années. D’un autre côté, à l’époque de la rédaction de la Bible, la théorie de l’évolution était tout à fait inconnue. Au mieux les grecs avaient-ils commencé à développer quelques soupçons à ce sujet – c’était notamment le cas d’Anaximandre de Milet. Mais si nous fermons les yeux sur ces soupçons somme toute marginaux, il est parfaitement logique que les hommes de ce temps aient tenu la nature et ses constituants – ses essences, ses espèces – pour donnés tels quels.

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Lecture de la Bible: Genèse I, 3-23

Lecture de la Bible: Genèse I, 3-23

Tout le long des versets 3 à 23 de la Genèse, qui correspondent aux jours 2 à 5 de la Création, Élohim réalise une série de séparations. Il sépare d’abord la lumière des ténèbres, puis les eaux des cieux des eaux de la terre, la terre des eaux, le jour de la nuit et enfin, au 5e jour, les animaux aquatiques des animaux des cieux. Ainsi, de l’unité originelle formée par Élohim et le mystérieux Abîme dont je parlais dans l’épisode précédent, nous passons progressivement à un monde séparé, éclaté, fait de constituants distincts.

Ce thème de la séparation, qui est mis en exergue dans ces quelques versets de l’Ancien Testament, me ramène tout droit à un splendide ouvrage de Georges Bataille intitulé Théorie de la Religion, que j’ai eu le bonheur de lire il y a quelques années.

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Lecture de la Bible: Genèse I, 1-2

Lecture de la Bible: Genèse I, 1-2

Au commencement, Élohim créa les cieux et la terre. La terre était déserte et vide. Il y avait des ténèbres au-dessus de l’Abîme et l’esprit d’Élohim planait au-dessus des eaux.

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Ce qui attire immédiatement l’attention dans ce tout premier passage de la Bible, c’est ce curieux Abîme baigné dans les ténèbres. Selon les notes du volume que j’utilise, ce mot est une traduction d’un terme hébreu qui signifie mer mais qui évoque plus largement une sorte d’élément féminin primitif. De manière générale, la mer, source de vie, est un symbole qui évoque le féminin. L’importance de l’Abîme est par ailleurs marqué par la lettre capitale. S’agit-il d’une sorte de matière primitive ou d’espace à partir duquel Élohim crée? Une sorte de canevas originel ?

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Lecture de la Bible: introduction

Lecture de la Bible: introduction

J’ai récemment décidé de réaliser un rêve que je caressais depuis longtemps et qui paraîtra peut-être saugrenu au lecteur ayant atterri ici dans l’espoir de se frotter à quelque travail philosophique « sérieux », à savoir de lire l’Ancien Testament. C’est une envie qui s’est progressivement installée dans le fond de ma cervelle avec les années, à force de me frotter à toutes sortes de références à ce vénérable ouvrage. Les philosophes parlent en effet souvent de l’Ancien Testament dans leurs dissertations et avec raison, dans la mesure où toute la culture occidentale est fortement imprégnée de la pensée chrétienne et donc de l’esprit de ce grand livre.

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La fin de l’été

La fin de l’été

La vie m’a enseigné qu’il y a toujours quelque chose à apprendre d’une promenade en forêt. Non pas forcément quelque chose à propos des végétaux, des animaux ou de la vie de la forêt en tant que telle – quoi que cela puisse certainement s’avérer, mais plutôt à propos de soi-même ou encore, si l’on a l’heur de faire une promenade en bonne compagnie, à propos de cette compagnie elle-même ou à propos des autres en général. Le lecteur doit toutefois savoir que l’histoire philosophique que je vais maintenant raconter émane plutôt d’une promenade solitaire. Lire la suite « La fin de l’été »

Le degré zéro de l’angoisse

Le degré zéro de l’angoisse

Comme le lecteur de ce blogue le sait déjà, ou comme il va maintenant l’apprendre, l’auteur de ces lignes est un ardent collectionneur d’angoisses. J’accumule en effet depuis maintes années ces petites et charmantes bestioles et les dispose amoureusement dans les replis de mon esprit. Dans mes temps libres, je les dépèce afin d’en élaborer la nomenclature et si possible, j’en tire quelque substance philosophique. C’est un passe-temps qui n’est pas de tout repos. Dans mes heures sombres, je geins comme un animal pris au piège, au milieu d’atroces convulsions. Des formes nouvelles de désespoir et de douleur me traversent. Je ne sais plus qui je suis ni où je vais. Lire la suite « Le degré zéro de l’angoisse »

Posologie de l’espoir

Posologie de l’espoir

L’espoir est la survivance de la rage d’agir au-delà de l’impuissance. Lorsque le désir qui habite un homme a des aboutissants qui ne sont plus à sa portée, il ne lui reste plus qu’à espérer, c’est-à-dire à propulser ce qui lui reste de rage d’agir dans les hauteurs, comme on jette une bouteille à la mer, comme on couche les mots sur une feuille de papier: pour les autres, pour que l’élément de sa propre pensée leur devienne accessible et qu’ils puissent participer à son impossible édification; ou alors pour soi-même, pour se délester un moment, le temps de laisser mûrir le fruit inaccessible, le temps d’accumuler des forces fraîches et de revenir, porté par un élan nouveau. Il est par conséquent inexact d’affirmer, à l’instar d’Albert Camus, que le fait d’espérer constitue une sorte de résignation. Lire la suite « Posologie de l’espoir »

Citation de la semaine: Marguerite Yourcenar

Citation de la semaine: Marguerite Yourcenar

Que j’aille dire à des malheureux que la coiffe d’or de Notre-Dame et son bleu manteau ne sont qu’un maladroit symbole des splendeurs du ciel, et le ciel à son tour une pauvre portraiture du Bien invisible, et ils en concluront que je ne crois ni à Notre-Dame, ni au ciel. Ne serait-ce pas là un pire mensonge ? La chose signifiée authentifie le signe.

– Paroles du Prieur des Cordeliers, dans L’Œuvre au Noir