Dans l’épisode précédent de cette petite enquête autour du concept proposé de totalitarisme guimauve, je discutais de la manière dont nous pouvons envisager une déclinaison contemporaine du totalitarisme qui soit exempte de terreur et ce, malgré le fait que précisément, le concept de totalitarisme soit très étroitement lié à la terreur des régimes nazis et bolcheviques du XXe siècle. Pour ce faire, je replaçais le phénomène de ces deux régimes dans un contexte beaucoup plus large, soit celui d’une maladie civilisationnelle à laquelle je donnais le nom de crise du nihilisme. La crise du nihilisme correspond ainsi à ce moment où le fil qui relie les individus à l’arrière-fond traditionnel et moral de la civilisation se rompt, laissant place à un monde où règne le relativisme. Lire la suite « Le totalitarisme guimauve – 2e partie »
Catégorie : Histoire
Le totalitarisme guimauve
À l’occasion d’un article coquinement intitulé Il faut rallumer Notre-Dame, que j’ai commis il y a quelque temps, non sans une certaine maestria, il m’est arrivé de décrire le monde d’aujourd’hui en utilisant l’expression de totalitarisme guimauve. Plus précisément, je qualifiais notre monde de la sorte parce que j’estimais qu’il est devenu « routinisé, préprogrammé, systémisé, bureaucratisé, sur-sécurisé ». J’affirmais aussi que nous y jouissons « de ces plaisirs préemballés que le marché saupoudre au-dessus de nos têtes, et qui ne nous font plus jouir depuis longtemps mais auxquels nous nous accrochons pour éviter de sombrer, ces petites choses empoisonnées qui émoussent petit à petit les zones érogènes de nos corps et qui finiront par nous rendre, si cela n’est déjà fait, complètement frigides ». Lire la suite « Le totalitarisme guimauve »
Citation de la semaine: Jean Baudrillard
Le problème posé par l’histoire n’est pas qu’elle aurait pris fin, comme le dit Fukuyama, c’est au contraire qu’elle n’aura pas de fin – donc plus de finalité.
– Mots de passe
La fin du grand rêve
J’ai toujours été fasciné par la progression étonnamment rapide de la carrière de John Lennon. Que l’on y songe: en 1965, il n’est encore qu’une espèce de Backstreet Boy de luxe dont la principale fonction est de faire frémir les jeunes minettes à la sexualité encore recouverte du manteau oppressant de la religion. À peine deux années plus tard, en 1967, il devient l’un des grands prêtres idéalistes de la vague hippie en proclamant, un joint à la main, et quelques amphétamines dans le corps, le pouvoir rédempteur de l’amour et de la paix sur terre. Trois petites années passent encore et cette fois, le Lennon nouveau crie sa désillusion la plus complète à l’égard des idées grandioses des années soixante. Lire la suite « La fin du grand rêve »
Mammouth et fier de l’être
Quand j’étais petit, c’est-à-dire il y a quelques millions d’années, mes semblables et moi écoutions de la musique principalement à partir de bobines de ruban magnétique fixées sur un support de plastique que nous appelions cassette audio. C’était un horrible support car le ruban se tordait constamment, se déchirait ou se déroulait et il fallait alors l’enrouler de nouveau manuellement. Pourtant, c’est un support qui nous rendait heureux et qui était, de notre point de vue, la réalisation même du progrès. D’ailleurs, beaucoup d’individus de mon âge ont connu l’incommensurable fierté de se promener dans la rue avec, à la ceinture, un rutilant walkman Sony Sports jaune. Lire la suite « Mammouth et fier de l’être »
La Reine Éthique
Il est frappant de constater à quel point la tâche qui consiste à définir ce qu’est la philosophie peut occuper les philosophes et leurs donner de grands maux de tête. Tous les plus grands penseurs de l’histoire s’y sont essayés: Platon, Aristote, Kant, Nietzsche, Hegel – nommez-les ! Gilles Deleuze prenait ce problème tant au sérieux qu’il a attendu jusqu’à la fin de sa vie avant d’écrire un ouvrage complet entièrement consacré à cette question. Il est également assez remarquable de constater qu’il y a sans doute autant de définitions de la philosophie qu’il y a de philosophes. Lire la suite « La Reine Éthique »
Citation de la semaine: Philippe Muray
[…] la voilà, la vraie Légende des siècles: un chapelet de mythes intéressés. La Grande Terreur ? L’An Mil ? La chute de Rome ? Superproductions romantiques ! Films à grand spectacle ! Inventions géniales, indéracinables, parce qu’elles correspondent à un désir humain, très humain, de croire à des « fins » pour se convaincre qu’il existe aussi des « commencements ». De commémorer des dates héroïques ou des morts ou des ignominies pour se donner l’illusion de conjurer sa mort personnelle en s’appropriant collectivement le temps.
– État de siècle